« Maintenant vous êtes guérie ! ». Des mots tellement attendus, qu'ils résonnent de façon irréelle après des mois de combat face à la maladie.   Guérie ? Alors y’a plus qu’à…   Le tapis rouge se déroule. Nouveau départ vers l’inconnu.   20 ans après, je me souviens de ce moment. Comme délestée d’un poids, une joie intense mêlée d’une étrange sensation de vide, de recommencement. La vie à reprendre là où elle s’était brutalement arrêtée à l’annonce de la maladie.   J’avais 23 ans quand le cancer m’a stoppée en plein vol. Embarquement pour un drôle de CDI : « Combat à Durée Indéterminée ». Face à un adversaire au nom barbare et au grade déjà bien élevé, Hodgkin stade 3, qui allait se montrer plus virulent que prévu et me mettre totalement hors circuit durant 2 ans. Une vie entre parenthèses, rythmée par des traitements éreintants. Coupée du monde par des mois d’hôpital en chambre stérile, chimio lourde, transfusions quotidiennes et greffe de moelle osseuse. Puis une lente remontée vers ce qui allait être un nouveau départ.   A 25 ans, cheveux et système immunitaire tout neufs, je repartais à zéro dans la vie. Surveillée comme le lait sur le feu, mais avec une joie intacte, une envie de vivre débordante. Un regard à jamais changé sur la vie, en total décalage avec ceux de mon âge. La sensation d’être une autre. Une survivante… « Toi tu as de la chance, tu t’en es sortie ». Ce qui n’était pas le cas pour plusieurs compagnons de galère, avec qui j’avais tissé des liens très forts et qui n’étaient plus là.   Comment vivre après ? L’après cancer, rien ne nous y prépare. On en parle peu. Et pourtant cette étape tout aussi délicate est décisive dans la reconstruction d’une vie qu’on a tellement hâte de retrouver « normale ».   Car le cancer, comme tout événement fort de la vie, crée une rupture de parcours. La ligne s’interrompt brutalement. Du jour au lendemain, tous les repères sont chamboulés, les priorités se redessinent, le quotidien se réorganise autour des traitements, le noyau familial se resserre ou parfois éclate, toute l’énergie se recentre sur un seul objectif : combattre, sauver sa peau.   Alors, une fois que ça s’arrête, après des mois de lutte sans répit contre un adversaire bien identifié, l’objectif si longtemps en première ligne change et doit être remplacé par autre chose. Mais quoi ? Comment se remettre en route ? D’abord se réapproprier ce corps qui a changé, avec les effets secondaires et la fatigue qui durent encore longtemps mais aussi se découvrir de nouvelles priorités. Les motivations ont changé.   Car la maladie au-delà de l’épreuve physique est un parcours initiatique qui met face à soi-même. Elle oblige à aller puiser en soi des ressources insoupçonnées, à se découvrir des facettes inconnues. Elle donne l’occasion de (re)faire connaissance avec soi-même. Réveillant à la fois une vulnérabilité mais aussi une grande force. L’envie d’aller à l’essentiel. De se questionner sur le sens de la vie. De s’engager dans une voie qui fait réellement sens pour soi, au plus profond.   Accompagner l’après cancer Aujourd’hui, je peux dire que cette expérience, qui m’a mise à sec de tout, m’a donné une foi inébranlable et a orienté de nombreux choix.   Ce sujet de l’après, du nouveau départ, me tient particulièrement à cœur. Et au-delà de m’engager dans des actions bénévoles de soutien à ceux qui repartent dans la vie après une période de marginalisation, due ou non à la maladie, j’en ai fait un axe de mon activité professionnelle, dédiée au coaching professionnel et personnel.   Car je suis convaincue qu’être accompagné à ces moments clés de transition dans la vie est essentiel pour reprendre confiance, regonfler l’estime de soi mise à mal, s’interroger sur ce qui motive vraiment et prendre la bonne direction. Pour moi, s’engager dans une voie qui tient à cœur, qui fait vibrer, est la clé pour préserver son énergie, réalimenter la pompe et insuffler le carburant nécessaire dans les moments de doute.   De quoi ai-je vraiment envie maintenant ? Qu’est-ce qui est important pour moi ? Quels sont mes besoins ? Comment retrouver le chemin du travail ? Reprendre ma place à mon ancien poste ou trouver une autre voie, en prenant le temps d’explorer de nouvelles pistes. Prendre soin de moi en m’octroyant du temps, pratiquer une activité sportive, un loisir créatif, tisser de nouveaux liens, m’engager dans une association, me recréer un cercle d’amis plus en phase avec ce que je suis maintenant, en acceptant que certains aient tout simplement déserté.   Et vous rappeler que les nombreuses ressources que vous avez su activer durant l’épreuve sont bien là comme autant d’atouts pour bâtir un nouvel équilibre en vous remettant au centre de votre vie. Car la personne la plus importante, c’est vous.   Guérir en reconnectant le corps, la tête et le cœur au centre !