C’est sans doute pour affronter ma perte de féminité que j’ose montrer ma poitrine en chantier. J’ose le regarder dans le miroir, ce corps devenu étranger, ce corps que je ne reconnais pas. Avec le temps, tous les deux devons nous réconcilier. Avec le temps, je lui trouverais un nom, celui que je ne reconnais pas comme un sein. Le voyage au pays du crabe est long, les parenthèses ne sont jamais des parties de plaisir. J’y ai laissé quelques plumes, mais je crois y avoir gagné un petit supplément d’âme. Vaincre la maladie invite à davantage d’amour, de tolérance. Vivre avec son corps mutilé est symbole de guérison, de rage de vivre. Je veux voir mes enfants devenir adultes et fonder une famille à leur tour, alors c’est avec conviction que j’avance. J’écris pour que les gens comprennent que la mutilation d’un sein est un traumatisme profond. J’écris pour convaincre les lecteurs que tout est possible. Que nous avons tous des ressources insoupçonnées. Le cancer, j’ai appris à vivre avec. Il fait parti de mon sac à dos mais je continue ma route, riche des épreuves passées, plus forte que jamais. Je sais aujourd’hui savourer l’ici et maintenant