En 2004, tu as sonné à ma porte. Je n’ai pas entendu le coup de sonnette, alors tu es entré sur la pointe des pieds. Quelques jours ont passé avant que je ne te remarque. Qui es-tu ? Que fais-tu là ? On se connaît ? J’ai vu dans ton regard ricanant que tu allais m’apprendre plein de choses, mais qu’avant de les connaître, je passerais des sales moments. Hou là ! on ne se connaît même pas et tu me traites comme une ennemie. OK. Tu me déclares la guerre ? Je vais me battre. Seul hic, je n’ai jamais appris à me battre, alors je vais m’organiser. J’ai été voir le Grand Stratège. Il m’a conseillé ceci : si tu veux gagner, il va falloir que tu puises une force énorme en toi. Aujourd’hui, tu ne sais pas où se trouve ta force, alors il va falloir commencer à faire connaissance avec toi-même, connaître les recoins secrets de ta personne et faire un sérieux tri. Quand tu auras appris à t’aimer, à te faire confiance, à te sentir capable de partir au combat, tu auras résolu une partie de la question. Pour bien combattre, il faut aussi connaître son ennemi. Que veut-il ? Jusqu’où est-il capable d’aller ? Quelles sont ses armes et sa stratégie ? J’ai commencé à visiter ma maison intérieure. J’y ai découvert des choses que je ne soupçonnais même pas posséder. Peut-être mes ancêtres les avaient-ils abandonnés dans mon grenier pour que je les retrouve un jour ? Pressée que j’étais de tout faire, de devenir un être admiré et idéal, je n’avais jamais pensé à ouvrir la trappe qui monte sous mon toit. Depuis le temps que j’habite ici, je ne connais même pas les étages de ma propre demeure. J’ai commencé à visiter, à fouiller, à trouver une explication aux choses, à me sentir enfin chez moi et surtout à avoir le courage de jeter tout le superflu aux ordures. J’ai trouvé que la maison n’était pas trop mal décorée, pourvue du strict nécessaire, bien meublée et prête à accueillir les amis positifs et souriants. J’ai appris à ne plus avoir peur du noir intérieur, à me faire confiance, à me résoudre à bien entretenir ce petit paradis. Mais…. Il y a un squatter dans la maison. Il est entré à mon insu et s’est installé. J’ai appris à le connaître pour mieux le démasquer. J’ai accepté cette cohabitation forcée, bien décidée à l’expulser le moment venu. J’étais prête à livrer mon premier combat. Pendant ce temps, il s’est construit un petit nid douillet en mon sein et s’y est installé confortablement. Il a déposé deux grenades à l’entrée afin qu’on ne puisse pas le débusquer. J’avais besoin d’aide. J’ai appelé les hommes en blanc, qui ont investigué le nid et ont préféré enlever les grenades avec le plancher pour ne pas qu’elles leur explosent à la figure. Me voilà avec une pièce en moins maintenant, mais apparemment tranquille. Ah que nenni ! Tu t’es réfugié plus loin. Tu es descendu vers la chambre verte, appelée « chambre hépathique ». Tu y as déposé tes petites merdes de métastases. Tu t’es bien assis dessus pour qu’on ne puisse pas les voir. Un peu comme la ménagère qui cacherait les poussières sous le tapis. On t’a débusqué saloperie et maintenant je suis certaine que j’aurai ta peau, un jour ou l’autre. J’ai fermé la porte de la chambre à double tour pour éviter que ta curiosité ne te pousse à chercher d’autres chambres plus accueillantes. Une décancérisation s’est imposée. A coup de produits chimiques, on ne te laissera aucun répit jusqu’à ce que tu saches que tu es toléré, mais pas invité. On ne te lâchera plus. Ca sera toi ou moi. Saches que tu n’es pas mon ami, que je ne te pardonnerai jamais le mal que tu me fais. Par contre, pour rester honnête, je voudrais te remercier de m’avoir ouvert ma maison intérieure. Tu ne savais pas que ça me donnerait une force extraordinaire et que tu ne me ferais plus jamais peur. Je ne t’aime pas, mais je vis à tes côtés. J’ai enfin trouvé la chaudière de ma force intérieure. Elle est inépuisable. Elle est ma seule ressource. Alors, quand je t’entends ricaner dans ton coin, je te souris… tout simplement. C’est mon arme préférée. Je te saperai le moral, je te détruirai. J’y mettrai tout mon art. Alors, un bon conseil. Si tu veux finir ta vie tranquille, sors de ce corps avant que je ne t’explose d’un sourire en plein cœur. Tel est mon souhait pour les années à venir. Celui qui me privera du bonheur, du moment présent, des gens que j’aime n’est pas encore arrivé sur cette terre. Alors, un crabe, tu penses…. Comme je ne suis pas rancunière, je te souhaite le meilleur : finir en surimi à la mayonnaise dans un sandwich !