Cancer du sein, C’est trois fois rien, V’là c’qu’ils m’ont dit Les mandarins. Pourquoi tu pleures ? C’est pas la mort, Allonge ton pèse Et t’en ressors. Y a qu’ les pauv’filles Qu’ont pas une tune Qui se rallongent Sur le bitume. Mais toi la bourge Pour le prix d’un Je t’en ferai deux Beaux comme des courges.   Cancer du sein On en revient, Te fais pas de bile, Sois pas débile. Pourquoi t’as peur ? Tu rentres au bloc, J’ôte ta tumeur J’ te mets une coque. Et pour ton môme, Si t’es stérile, Y a les génomes, Ça marche très bien, Tu l’ nourriras D’ tes faux nichons, Faute de lait Donneras du plomb.   Cancer du sein, Y en a tout plein, Une femme sur cinq, ça me rend dingue. Pourquoi docteur, Ça devient l’horreur ? J’entends plus qu’ ça Autour de moi. Faut pas les croire, C’est qu’des histoires, C’est génétique, Pas transgénique, L’poulet aux hormones, Le trou d’ozone, La pilule à vie, C’est bon pour les filles.   Cancer du sein, Vous êtes pas bien, Je veux pas de chimio, Pas de radio. Je vais me tirer, Me barrer d’ici Sur une terre Où y a pas de cancer Où on n’meurt pas, De ce qu’on respire, Où on n’meurt pas De se nourrir Où y a pas de stress, Pas de dépression, Et où la paresse Est une religion.   Cancer du sein, T’es dans le pétrin, Cesse de rêver, Faut accepter, Y a rien à faire, Faut qu’on t’opère. Je crève de rage, J’suis pas d’accord, Allez, sois sage, J’préfère la mort. Vont m’arracher C’que j’ai de plus cher, Vont me voler Là sous ma chair, Mon âme de femme Mon âme de mère.   J’ai plus qu’un sein, J’ai plus le cancer, J’ suis moins que rien, Une pauv’ misère, Ils m’ont bien dit Qu’ j’allais guérir, Mais pas qu’la peine, Me f’rait mourir. Ils ont pas vu Qu’sous mon sein nu, Y avait mon cœur, Qu’allait saigner Ils ont pas vu Qu’ sous ma poitrine, Y avait mon ventre Qu’allait hurler.   Alors, ma fille, Ma pote, ma sœur, Prie le Bon Dieu Ou qui tu veux, Qu’il te protège De ce malheur Qu’est de donner Un sein d’amour Et de caresse, Un sein d’velours Et de tendresse. Et garde l’espoir, Il faut y croire, Qu’on guérira Peut-être demain L’cancer du sein."   J' ai écrit ce texte en mai 2008, la nuit après l' ablation de mon sein droit. Aujourd'hui, je suis guérie et je vais bien, malgré une prothèse à refaire!! J' embrasse toutes celles qui ont traversé ou traversent cette épreuve, Sylvie Troxler, Strasbourg