tout juste 38 ans , à la veille de noêl 2009, visite de routine chez le gynéco: son dernier rdv de la journée, et là à la palpation , le choc il sent une grosse boule. je vois dans ses yeux son inquiétude lorsqu'il me presse de vite faire les examens complémentaires. lors de la biopsie, je sens aussi le jeune médecin très affecté car il a compris et lorsque je me rhabille, , je sens son regard sur moi, je me retourne et vois qu'il me fixe d'un air désolé, plein de pitié. je n'ai pas besoin d'avoir les résultats de la biopsie pour comprendre ce qui m'arrive, je le sais et le dis à mes parents complètement abattus, avec déjà mon père combattant un cancer de la prostate.
Quand les résultats définitifs tombent , j'en informe mon patron , qui , bien qu''il n'ait pas été toujours très sympa , est affecté de cette nouvelle et me dit de ne penser qu'à mon traitement et de ne plus penser au boulot , car je le laisse du jour au lendemain dans une merde incroyable, et qu'ils s'en sortiront sans moi , et que je retrouverai mon poste à mon retour. je ne sais pas s'il croyait vraiment que je reviendrais un jour...
moi je sentais que je n'allais pas mourir mais dans quel état allais je finir avec ce combat... j'étais désespérée et très en colère envers tout, moi qui n'avais jamais fumé, jamais bu une goutte d'alcool, ayant toujours mené une vie saine, pourquoi ça m'arrivait à moi ? et mes enfants si petits, pourquoi devaient-ils souffrir à cause de moi alors qu'elles avaient 6 et9 ans ? j'étais révoltée...
et mon voyage en enfer commence par l'opération, par chance on m'a juste enlevé la tumeur sans ablation, et le curage axillaire . Ensuite la chimio, tellement éprouvante physiquement, je me voyais dépérir, je gonflais, me fripais, devenais chauve, j'étais épuisée sans oublier ces tas de médicaments contre tous les effets secondaires, ces terribles nausées, ce gout de métal dans la bouche qui dénature tous les aliments, ces aphtes, ces problèmes intestinaux, ces terribles douleurs dans les os, gencives et articulations, un véritable enfer, et cette fatigue pesante insurmontable, ne plus supporter le son de la télé même bas, ne pas pouvoir porter une casserole, l'ENFER !!!
je pensais que je ne pourrais jamais m'en remettre, même avec l'amour des mes enfants qui m'ont toujours regardée comme une maman, et celui de mes parents à distance puisque ma mère soignait mon père de son cancer de la prostate qui empirait. Puis à la fin des chimios, éreintée, j'ai connu la douleur de perdre mon père de ce cancer de la prostate qui l'avait terrassé alors que je n'avais pas pu le revoir depuis 3 mois car lui plein d'infections et moi sans défenses immunitaires, les médecins m'avaient dit que moi j'avais une chance de m'en sortir mais pas lui, alors qu'il ne fallait pas que je courre le risque d'attraper ces infections en allant le voir... DOUBLE PEINE pour moi, malgré ma fatigue, j'étais révoltée envers tout et tous, j'ai écrit au pape en lui demandant pourquoi son Dieu me faisait subir toute cette souffrance physique et morale j'ai bien cru que je ne m'en remettrais pas...
trop faible mais voulant assister à son enterrement , ma mère a décalé de 15 jours son inhumation, ce qui a dû lui couter un maximum d'argent elle enterrait son mari et sa fille était mourante ou presque... je sais que des gens venus assister à l'enterrement de mon père étaient bouleversés de voir que notre famille était terrassée par le crabe, car ils ne s'attendaient pas à me voir malade avec un foulard... Après l'enterrement, je me suis coincée le dos en montant en voiture et ai trainé une très douloureuse sciatique liée à une hernie discale pendant de nombreuses semaines...l
es séances de rayons sont arrivées 4 fois par semaine, avec ma sciatique et en RER bondé chaque jour, pas une personne ne m'a laissé une place assise. Avec mon foulard, tout le monde me prenait pour une convertie et pas pour une cancéreuse, pourtant je n'avais plus ni cil ni sourcil., il suffisait juste de me regarder pour comprendre mon malheur...
les rayons se sont bien passés je n'ai pas été brulée alors que je suis très blanche de peau, puis la curiethérapie où le médecin qui m'a enlevé les grosses aiguilles m'a dit que le maximum avait été fait pour me sauver mais qu'il ne savait pas si ce serait suffisant pour que je sois sauvée...l 'épée de damoclès...
je suis en survie, pour combien de temps ? le plus dur est passé, maintenant il faut attendre et se reposer. mais je suis épuisée je souffre de cette sciatique et je suis abattue de la perte de mon père... mes filles m'ont tirée du fond du trou patiemment avec tout leur amour... petit à petit... mes cheveux ont commencé à repousser, tout doucement, mes cils et sourcils aussi. moi qui ne m'étais jamais maquillée mais qui ai tant souffert de l'état de délabrement physique dans lequel j'étais, je me suis empressée de mettre du mascara dès que de petits cils sont apparus... j'ai combattu difficilement mais mes défenses immunitaires remontent et apparemment mon état est stable d'après les médecins qui m'ont mis sous traitement pour 5 ans...
j'ai été arrêtée
14 mois, puis j'ai repris à mi-temps thérapeutique... j'ai bien récupéré mon poste comme mon patron l'avait promis, mais j'étais toujours très fatiguée, j'ai bien cru que je ne remonterais pas la pente... puis 1 an après j'ai repris à plein temps, pas facile non plus , le soir j'étais couchée à 20 h... je me suis sentie moins fatiguée courant 2013, moins fragile et aussi moins triste...
et pendant l'été 2013 j'ai eu un déclic , même mes enfants l'ont remarqué, j'ai décidé de vivre pour ce qu'il me restait à vivre... je me suis occupée de moi, racheté des fringues, j'ai retrouvé le sourire et une gaieté que j'avais perdue...
je veux faire ce que j'ai envie et ne pas faire ce dont je n'ai pas envie... je suis en sursis et je ne sais pas jusqu'à quand je vais vivre alors j'essaye d'en profiter égoïstement je l'avoue, mais maintenant je ne pense qu'à moi, en plus des enfants bien entendu... depuis je me sens bien dans ma peau, plus heureuse même si j'ai de grands moments d'angoisse... même au boulot, les gens ont remarqué le changement et me disent souvent que je suis un vrai rayon de soleil, moi qui ai pourtant tant pleuré de mes souffrances physiques et morales... certains qui m'avaient croisée malade avec mon foulard n'en reviennent pas de me voir si joyeuse, et si rayonnante... même le gyneco qui m'avait détecté mon cancer m'a dit que je rayonnais depuis quelques temps !!!
les gens que je croise ne peuvent pas savoir ce que j'ai combattu en me regardant, mais il faut dire aussi, que la vie m'a réservé une très belle surprise à laquelle je n'aurais jamais cru, même si on me l'avait dit, et qui m'a transformée... la roue a tourné pour moi... je suis sûre que mon père, de là haut , est dans le coup... regardez moi, vous voyez du bonheur ou du malheur sur cette, photo ? et je suis toujours en rémission , pas encore guérie... de toutes façons jamais guérie pour les banques, les assureurs etc... pour toutes les malades qui vivent cet enfer comme je l'ai connu, gardez espoir, le tunnel est très très long mais il y a une lumière au bout... et il faut profiter au maximum du sursis qui nous est accordé, et des bonheurs que la vie nous apporte par la suite, car malgré tout nous aurons toujours l'épée de damoclès au dessus de la tête...