Je sors du cabinet de radiologie, anéantie, une boule énorme au ventre, au cœur, un étau qui me serre et m’étrangle partout. Tout se mélange dans ma tête : mon cerveau  a du mal à mettre de l’ordre dans toutes les informations qu’il vient de recevoir.

Je suis à nouveau submergée par des émotions et des questions qui me donnent envie de hurler et pourtant je reste calme, les larmes au bord des yeux, en me demandant comment je vais bien pouvoir faire si les résultats s’avèrent mauvais : où vais-je trouver la force qu’il me faudra au cas où ?

Pourtant, j’essaie d’être lucide : pour l’instant  « doute » ne signifie pas cancer.

Je suis une personne intelligente à qui l’on peut parler et dire les choses telles qu’elles sont et surtout une personne que l’on surveille comme « l’huile sur le feu » me dit mon radiologue. Alors, pas de panique.

Micro calcifications sur le sein droit classées ACR3 et Micro calcifications sur le sein gauche classées ACR2 ne veulent pas dire cancer. Petit crabe qui se terre au fond de soi et qui peut surgir à tout moment. Qui attend, on ne sait quoi pour commencer son désastre, qui gagne encore plus qu’il ne perd, qui pourrit la vie et qui perturbe de la tête aux pieds. Cette vermine, si elle ne nous bouffe pas, nous rappelle que la vie est courte et qu’il faut la vivre intensément et le mieux possible.

J’apprends très vite le classement de ces foutues micro calcifications.

ACR1 présence.ACR2 à surveiller. ACR3 à surveiller de très près.ACR4 Gros risque de cancer.ACR5 le top du top. Aucun doute. CANCER.

…Encore des emmerdes.

Je sors de la clinique, pas rassurée du tout. Le spécialiste trouve que les images de la mammographie ne sont pas bonnes et il est surtout interpellé par la rapidité à laquelle sont apparues toutes ces micros calcifications. Il faut donc aller voir et inspecter de très près : IRM jeudi prochain et mammotome une semaine après.

Il prend le temps de m’expliquer point par point cette petite intervention. Une macro biopsie va prélever très large et profond les tissus mammaires abîmés qui n’ont pas une image correcte. Cette ponction est relativement difficile chez les patientes à petite poitrine. Et bien sûr, mes seins sont tout petits.

Alors, le moral en a pris un sacré coup et à nouveau une immense anxiété m’étreint. Je suis inquiète, c’est vrai, et je ne sais pas comment faire pour surmonter tout ça. Même si cette nouvelle sera assimilée petit à petit, les prochaines semaines ne vont pas être faciles.

J’espère que j’aurai les résultats début novembre, j’espère qu’ils ne seront pas trop mauvais.

« Je ne veux pas retomber malade.

Je ne veux pas recommencer les opérations et les traitements difficiles.

Je ne veux pas retrouver ces angoisses.

Je veux vivre … et merde ! »…

…Cancer…

Voilà, j’y suis ! À nouveau. Pas la peine d’attendre trois semaines.

L’IRM a révélé des lésions cancéreuses (aucun doute là-dessus), très étendues, la chirurgie sera probablement large, dixit le spécialiste. Micro calcifications ACR4. Evolution super rapide en à peine trois mois. Pourquoi ?

Le radiologue, spécialiste des images sénologiques a l’air désolé, sincèrement. Je suis encore jeune et il connaît mon parcours. Passé médical et chirurgical tellement lourd ! J’ai l’impression de tomber dans le vide et n’arrive à me raccrocher à rien. Je n’ai plus qu’à attendre (encore attendre) le mammotome mercredi prochain qui « raclera » le maximum de tissu pour l’analyser et voir de quel type de cancer il s’agit, quel est son stade d’évolution et comment procéder pour s’en débarrasser.

Ça y est : je suis prise en charge. La secrétaire s’occupe des rendez-vous. Mammotome. Chirurgien. Je me laisse faire. Je sors dans un drôle d’état, état second, un peu sonnée par les cachets que j’ai dû prendre pour l’IRM.  « C’est mieux, m’a dit le médecin pour entendre tout ce que j’ai à vous dire. » Vraiment ?

Le chemin de croix va recommencer.

Cancer, cancer… merde !

Un autre, un nouveau cancer en si peu de temps. Sept ans après celui du côlon, pratiquement jour pour jour. J’ai mal partout. Je suis seule à nouveau.

Je surfe sur internet pour glaner le maximum d’informations sur le cancer du sein, les statistiques, les pourcentages de survie, les traitements. J’ai trouvé du bon et du mauvais. J’ai passé des heures, à me brûler les yeux, et essayer de trouver des renseignements fiables pour me rassurer.

Je ne veux parler à personne.