J’attendais de cette nouvelle année, une santé de fer, beaucoup de lumière et un pas vers ma nouvelle ère. J’ai passé les deux premiers mois à piétiner, à galérer, mais sans jamais douter que j’allais finir par y arriver. Mon démarrage est un peu long, mon état général n’est pas très bon, mais mon moral est un champion.

Aujourd’hui, je ne sais plus, je m’inquiète de l’arrivée de ce vilain virus qui fait de moi une « Minus ».

Il y a deux semaines à peine, je me suis rendue chez ma kiné pour soulager les cicatrices de mes anciens nénés.

Elle m’a reçue dans les règles de sécurité : pas de serrage de main et décapage du terrain.

Pour éviter de me toucher, j’ai même cru qu’elle allait me proposer de remplacer ses massages habituels par un appel divin ou virtuel.

J’ai commencé à réaliser que ma vie était de nouveau en danger, mais je suis rentrée à la maison presque flattée par cette attention et ces gestes de protection.

Puis notre président s’est exprimé.C’est à mon fils que j’ai pensé.

Je voulais qu’il rentre vite à la maison, que l’on prenne soin de ses poumons.Mais lui, c’est pour moi qu’il s’inquiétait.Il a raison ce grand garçon, mon système immunitaire a les quatre fers en l’air.

Si ce virus m’approche, il pourrait bien m’emporter loin de mes proches.Je suis trop faible et trop fragile, je ne pourrai jamais lutter. Lorsque j’ai voulu aller voter, la machine s’est emballée.

Serais-je inconsciente ou quoi ? Serais-je folle d’imaginer un seul instant que seules les règles de sécurité vont suffire à me protéger ?Aurais-je oublié que ce sont les autres qui pourraient me tuer ?Bien évidemment, j’ai fini par céder à mes peurs.

Je me suis sentie une « moins que rien » à ne pas assurer mon rôle de citoyen mais j’ai aussi pris conscience de la fragilité de mon existence.

J’ai réalisé que cette fois le danger arrivait de l’extérieur.

C’est à compter de ce jour que je me suis déclarée La Fée Clochée.Je me suis mise sous verre le temps du confinement.Je me protège tel un objet fragile mais précieux aussi.Je suis à la maison, entourée de ma famille comme protection.Je suis à la maison, parfois étouffée par trop d’attentions.Je suis à la maison, cette cloche qui me sauve la caboche.

J’ai enfin conscience du danger extérieur.

Le cancer ne m’a pas encore tuée, mais un virus pourrait y arriver.

Ce n’est pas la première fois que je suis menacée.

Mais aujourd’hui, c’est des autres que dépend ma vie.

Je suis, comme toutes les Fées Clochées de ce pays, abasourdie par tant d’abrutis, effrayée par leur esprit si petit.

Je suis en colère car moi, je fais le nécessaire pour rester sur terre.

Je voudrais qu’ils pensent à moi la Fée Clochée un peu trop cabossée.

Je voudrais qu’ils aient envie de me protéger aussi.

Je voudrais qu’ils soient fiers de mes efforts et m’apportent du réconfort.

Je voudrais qu’ils cessent de balancer des pierres sur ma paroi de verre.

Je voudrais qu’ils m’aident à rester en vie.