Octobre rose, ruban rose, la flamme rose, les roses ceci ou cela…, ras-le-bol du rose dans ma vie (Pardon Rose-Up magazine !)

En ce moment, et depuis quelques jours, j’ai le blues et je vois la vie en bleu. Pas en noir, en bleu.

Entre le rose et le noir, il y a une belle palette de couleur. J’aurais pu choisir l’orange de l’optimisme ou le rouge du triomphe, en passant par le vert de l’espérance.

Ben non. J’ai choisi le bleu parce que dans la symbolique des couleurs, le bleu est associé à la sérénité, la rêverie, la sagesse, la tranquillité, le calme, bref, au repli sur soi et cela correspond bien à mon humeur du moment. Et puis, parce que cela sonne bien avec « blues ».

Je m’approprie totalement le contenu d’un article publié par Rose-Up magazine (déclic de ce post qui me trottait dans la tête depuis quelques jours), et dont, je ne résiste pas à citer le titre «  Non à la dictature de l’optimisme, j’ai le droit d’être triste ! » J’en ai assez de devoir toujours voir mon présent en rose et d’être obligée de me projeter dans un avenir rouge triomphant. Je me donne le droit de vire une parenthèse bleutée, d’être triste parce que oui, j’ai mal dans mon corps et dans mon âme, de me sentir faible et faillible dans ce combat, de pleurer.

Tels des « bleus » sur la peau, mon corps se rebiffe et, au fur et à mesure des séances hebdomadaires de chimio, réveille des douleurs oubliées ou inconnues, qui sont forcément sources d’angoisse : métastases ou simples douleurs dues aux effets secondaires des poisons qu’on lui injecte ?

J’ai le blues au cœur, parce que mener le combat seule est de plus en plus dur. Les messages et les actes de soutien s’espacent. Normal. Chacun a sa vie, ses joies, ses occupations, ses projets, ses emmerdes aussi.

Je le sais depuis le début que je vais le mener seule ce combat et je m’attendais à cette défection.

Je sais aussi que c’est primordial de garder un mental positif dans le processus de guérison, mais là, en ce moment, c’est le cancer qui mène la danse, une java bleue bien sûr !

La solitude, l’éloignement et les occupations de ma famille et de mes amis, l’absence de ceux que j’aimerais avoir à mes côtés m’oblige à m’apitoyer sur mon propre sort et d’être alternativement « la démoralisée et la remonteuse de moral » , « l’enjouée et la triste », « l’énergique et la mollassonne », « l’indulgente et la dure». Janus : sort de ce corps !

Certes tout n’est pas noir et le pire n’est pas obligatoire.

Dans cet article, j’ai découvert le terme de « pessimiste actif » et il me va bien. Je le sais, dans quelques temps, je vais rebondir et je vais trouver les ressources pour ne pas me laisser submerger par cette vague bleue.

Et à en croire le philosophe Martin Steffens, auteur de La Vie en bleu (Marabout) la couleur des pessimistes actifs serait le bleu: « À mes yeux, le bleu correspond à la juste articulation au réel car il évoque à la fois l’espérance et le « bleu de travail » (le sens de l’effort), les « bleus à l’âme » (le coup de blues). 

Lorsque je faisais de la course à pied et que j’étais sur la ligne de départ d’un marathon, je ne me suis jamais dit que j’allais devoir courir 42,195 km. Je partais pour un 10 km, puis pour un semi, puis pour 30 km, puis pour l’arrivée.

Symboliquement, j’ai fixé la ligne d’arrivée de mon cancerothon au 8 août 2019 et tous les jours, je m’y projette. La course a commencé il y a 170 jours, le 8 août 2018, jour de l’annonce. L’épreuve est encore longue : 196 jours, 9 étapes de nage (chimios), x étapes de trek sous le soleil (radiothérapie), etc. etc. mais là, je l’avoue, je suis dans « le mur du marathon »*.

Et parce que sur une course, il ne faut pas négliger les ravitaillements, et parce qu’après tout le bleu est une jolie couleur, je me suis préparée des phases de ressourcement, une sous le ciel bleu des alpes fin mars et une au bord du bleu de l’océan au Portugal en juin.

En attendant, …. c’est jeudi, j’ai chimio !

* Le « mur du marathon » est un phénomène physiologique reconnu, qui correspond à l’épuisement des réserves de glycogène, dit autrement, à une panne de carburant musculaire. Il s’agit d’une défaillance physique assimilable à un coup de pompe qui intervient subitement, sans signe annonciateur entre le 30 et le 35e km. Le coureur qui « frappe le mur » ressent une sensation de jambes coupées, telle une force qui le bloque.