Lorsque le médecin m’a confirmé le cancer, le temps s’est arrêté alors qu’il continuait à parler. Je n’entendais rien car il n’y avait qu’une phrase rayée dans ma tête : « je vais mourir, je vais mourir, je vais mourir… ». Il a fallu un deuxième rendez-vous avec lui pour écouter cette fois les explications sur le déroulement des différents traitements.

Et puis non, le mot « mourir » n’est pas dans mon dictionnaire pour l’instant, après tout, la recherche avance et il faut faire confiance, car il faut garder un mental d’enfer, et ça c’est le plus difficile car oui on pleure, oui on a mal, oui on a envie de baisser les bras mais on a envie aussi de vivre longtemps.

C’est en échangeant avec les autres femmes pendant les chimios, les radiothérapies, ainsi qu’avec les infirmières et autres membres de l’hôpital que je me suis mise à écrire mon spectacle.

Quoi de plus efficace pour le moral que d’en parler chacune à sa façon, moi c’est à travers le théâtre.

Parler du ‘‘crabe’’ avec humour était évident pour moi, aussi évident que la volonté de transmettre ce qui se passe lorsque l’on est non pas spectateur mais acteur de cette maladie.

Je retrace le parcours d’une femme depuis l’annonce de son cancer jusqu’à nos jours, décrivant les péripéties rencontrées à l’hôpital, dans les banques, les pompes funèbres, l’amour mais aussi face aux différentes réactions des personnes rencontrées.

On ne sait comment comprendre et aborder une personne atteinte d’un cancer. Je transmets à travers mes mots ce que beaucoup de femmes malades n’osent pas dire tout haut ; c’est une prise de conscience de ce que l’on endure sans jamais tomber dans le pathos, bien au contraire, avec beaucoup d’humour !

J’ai voulu que ce spectacle soit un feu d’artifices de rires et de larmes, d’émotions et de vérités, où se mélangent musique et danse, où se mélangent la mort et la vie, tout cela avec une grande légèreté.

J’ai joué 3 mois à Paris avec tellement de plaisir que moi-même j’avais oublié que j’étais toujours sous traitement. Et vous savez quoi ? On m’a proposé le festival Off d’Avignon ! Alors j’ai fait ma valise et j’ai pris le train, heureuse !

Je joue pour les autres, je suis tellement bien sur scène que l’on ne remarque pas que j’ai été aussi malade, toujours avec mes douleurs, ces douleurs qui vous le rappellent, qui font parties intégrantes de votre quotidien et que l’on cache.

Alors ne jamais baisser les bras…

Mary-Tahra