Le traitement pour soigner mon cancer du sein (j’avais 47 ans) a débuté fin Août 2006 et s’est achevé au printemps 2007. Une chimio difficile suivie d’une radiothérapie. J’ai décidé avec enthousiasme de reprendre mon travail en Septembre 2007 : je suis enseignante en collège, à mi-temps (9H) depuis plusieurs années. J’aime énormément mon métier... Les médecins ont encouragé cette reprise, malgré un état de fatigue physique important mais jugé consécutif à la chimio...
Cette fatigue ne s’est pas estompée mais aggravée. Après trois heures de cours, je rentrais chez moi épuisée, vidée de toute énergie (2 fois 21 kms de trajet en voiture, avec des bouchons parfois sur le périphérique nantais) pour me coucher... Même chose le week-end... Epuisée physiquement et intellectuellement au bout de quelques semaines de classe. Incapable de me bouger pour les tâches ménagères ou des sorties qui m’auraient plu. Mais le nez plongé dans les préparations, les cours, les travaux administratifs... couchée dans mon lit qui est devenu mon bureau! Le médecin m’a prescrit toutes sortes de traitements, sans efficacité. Il a pris l’habitude de m’arrêter 2 fois dans l’année: 3 semaines en hiver et une semaine fin Juin. Des parenthèses réparatrices... Mes collègues et mon “chef” m’ont proposé gentiment ne pas assister aux nombreuses réunions, ce que j’ai dû accepter... Toute notre vie a tourné alors autour de ce mi-temps d’enseignante, rythmée par mes défaillances physiques. Je récupérais toutes mes forces pendant les vacances scolaires... Et je reprenais mes cours en Septembre en me disant que cette fois, tout redeviendrait comme AVANT!
Ce n’est que 5 ans après que j’ai compris que je ne pouvais plus continuer ainsi et qu’il ne m’était plus possible d’exercer mon métier sans que cela se répercute sur ma vie familiale et ma santé. A ce moment-là, je me suis sentie profondément déprimée! Où donc était ma place alors? Je n’étais plus apte à faire une des choses qui me plaisait le plus... J’étais devenue un corps en loques! Je n’étais plus MOI! Je me suis sentie humiliée, blessée dans mon orgueil. Trahie encore une fois par ce fichu corps (du moins je le prenais ainsi!) qui ne répondait plus à mes désirs! Profondément diminuée! A mettre au compost!!! Pendant 7 mois, ce fut encore plus difficile. Jongler entre mes idées noires (mourir arrangerait tout?), la fatigue, et la vie quotidienne... Un véritable BULLSHIT ... J’enviais la bonne santé et l’énergie physique de tous mes collègues...Parfois même, à propos de certains vantards, je pensais: “Une bonne petit chimio lui ferait du bien à celui-là!” ... Honte à moi...
Aujourd’hui, je me sens plus apaisée. Je termine l’année sur les rotules mais j’ai pris ma décision, en concertation avec mon mari (d’une patience inouïe) : demander ENFIN à mon médecin d’entrer dans une mise en incapacité. Je veux que le corps médical reconnaisse que si les traitements m’ont permis une rémission, ils ont eu aussi des effets dévastateurs sur mon organisme. J’accepte ENFIN l’idée de ne plus exercer mon métier et de garder mes forces pour ceux que j’aime et pour moi-même, le temps qu’il me reste à vivre... et j’espère de tout mon cœur qu’il sera long! J’ai plein d’idées pour ce nouvel avenir qui s’ouvrira à moi.... Je ne peux plus faire les mêmes choses qu’AVANT? Eh bien, tant pis : j’en ferai d’autres!