Je résidais en Irlande depuis près de 9 ans quand la pandémie du Covid a transformé le monde entier. Séparée du père de ma fille qui avait 3 ans à l’époque, je travaillais comme chargée de clientèle en télétravail pour une entreprise informatique américaine. Je vivais dans un tout petit village, éloignée de toute vie sociale pour être proche de la famille du père de Gabriella.


Ces mois de confinement et de hausse d’activité ont eu raison de ma santé mentale et j’ai fini par faire une dépression. Je voulais rentrer en France depuis des mois mais partir sans ma fille n’était pas une option. Au 1er janvier 2021, j’ai donc décidé de chercher un nouveau poste et de rentrer dans ma ville natale – Troyes.

Au cours d’une banale conversation téléphonique avec un ami, j’ai senti une petite boule en haut de mon sein gauche. Sensibilisée au cancer du sein durant le dernier Octobre Rose, j’ai tout de suite pris rendez-vous avec mon médecin généraliste. Quelques jours plus tard, je me rendais dans une clinique privée pour une mammographie. Bien loin de m’imaginer qu’un diagnostic pourrait tomber, trop occupée à organiser ma recherche d’emploi et mon futur départ vers la France, je suis dans le déni et l’ignorance.


Je me réjouis quand je reçois ma promesse d’embauche le 19 février, je me projette, je cherche un appartement et je prépare mon déménagement avec énergie et entrain. Mais le 24 février, le retour à la clinique est synonyme de l’annonce d’un cancer du sein de type HER2+, un cancer rare et agressif. On parle tout de suite de chimiothérapie, de radiothérapie, d’une première opération qui doit arriver à peine une semaine plus tard.


L’Irlande étant encore en confinement avec une quarantaine de 14 jours imposée pour toute sortie du territoire,, il m’est impossible de rentrer en France pour annoncer cette terrible nouvelle à mon entourage. C’est donc par téléphone que j’appelle un par un les membres de ma famille et mes amis.

Le choc est terrible et je ne sais pas comment annoncer cette nouvelle que je ne comprends pas tout à fait moi-même.

Mais le combat doit désormais commencer ! Je n’ai pas de temps à perdre, je vais rentrer en France et me lancer dans cette nouvelle aventure professionnelle. Quelques semaines plus tard, je traverse la Manche en ferry avec mes cartons et ma fille, heureuse de ce nouveau départ et inquiète à l’approche de ce parcours de soin qui va commencer.

627 jours s’écouleront entre le 1er rendez-vous à l’hôpital de Galway pour ma 1ère mammographie et ma toute dernière injection d’immuno à l’ICANS de Strasbourg.

Les émotions sont toujours aussi fortes lorsque je revois mon crâne rasé, quand j’observe quotidiennement le magnifique tatouage qui a remplacé mon sein gauche. A chaque nouvel examen de contrôle, à chaque passage par l’hôpital, je tremble d’inquiétude.

Mais je m’en suis sortie. La lutte s’est terminée et j’ai rempli ma mission. J’ai entre temps changé de région, je me suis lancée dans une formation professionnelle pour changer de métier, j’ai pu acheter mon appartement, j’ai rencontré des médecins dévoués et des patientes résiliantes et fortes.

J’ai aujourd’hui à coeur de rendre tout ce que l’on m’a donnée. Je fais donc partie de l’Association Vivre comme Avant et je rends régulièrement visite aux patientes qui traversent une épreuve similaire à la mienne, afin de leur offrir un espace d’écoute et les rassurer sur l’avenir qui les attend après la maladie.


Sans mon cancer, je n’aurais jamais accompli toutes mes petites victoires et je ne serais pas en France, aux côtés de mes étudiants, dans une région magnifique avec ma petite fille qui grandit et me donne tant de force et de puissance pour continuer à tracer ma vie.

Le cancer n’est pas une fatalité, il peut tout changer et dans mon cas, je veux être l’exemple qu’il a tout transformé, mais simplement pour le meilleur et plus jamais pour le pire.