Aujourd’hui, c’est la journée mondiale de la lutte contre le cancer, et ce n’est pas vraiment en combattante ou en guerrière que je la mets en lumière. Il faut dire que cela n’est pas toujours facile de penser au monde entier tout en souffrant de la tête aux pieds. Mon deuxième essai de petit cachet protecteur s’est très vite arrêté. Au bout de dix jours, je ressemblais à une vieille mémé. Je ne parle pas de celle que l’on peut voir dans les publicités à la télé pour les fuites urinaires ou autre sujet de grand-mère. J’étais une vraie « vieille-mémé » : dos vouté, sensation d’os brisés, appétit altéré. Bref, j’ai été stoppée dans ma lancée du nouvel essai. Demain, je pars sur une troisième tentative sur les conseils avisés des experts du cachet. J’espère que celle-ci sera la bonne, qu’elle me convaincra de ses bienfaits, car là, je commence à douter. Bien que très dur à exprimer, très pesant à partager, je me questionne sur mon devenir car il ne semble pas décidé à me sourire. Les évènements de ces derniers mois, les douleurs qui s’en sont prises à moi m’ont affaibli l’esprit je crois. Est-ce que je la veux à tout prix cette vie ? Est-ce que je suis prête à gérer ces effets secondaires toute ma vie pour gagner quelques années supplémentaires ? Si je pose cette question à toute personne en dehors de moi, on me répondra que c’est une évidence. Alors, je ne la pose pas, c’est mieux comme ça. Est-ce que je suis prête à mettre en place toute ma vie des soins de support me permettant de m’apporter un peu de confort et ainsi m’aider dans mes efforts ? Si je pose cette question à toute personne en dehors de moi, on me répondra que c’est une évidence. Alors, je ne la pose pas, c’est mieux comme ça. Est-ce que je suis prête à accepter toute ma vie une vie intime altérée malgré l’amour inconditionnel qui m’est donné encore aujourd’hui ? Si je pose cette question à toute personne en dehors de moi, on me répondra que c’est une évidence. Alors, je ne la pose pas, c’est mieux comme ça. Est-ce que je suis prête à supporter toute ma vie le regard abîmé et inquiet de mes enfants chéris devant leur maman fatiguée et cabossée par les traitements infinis ? Si je pose cette question à toute personne en dehors de moi, on me répondra que c’est une évidence. Alors, je ne la pose pas, c’est mieux comme ça. Est-ce que je suis prête à demander toute ma vie de l’aide à mes proches pour assumer les tâches qui pour moi ne sont plus « fastoches » ? Si je pose cette question à toute personne en dehors de moi, on me répondra que c’est une évidence. Alors, je ne la pose pas, c’est mieux comme ça. Est-ce que je suis prête à faire le deuil pour toujours d’un retour normal dans une vie professionnelle qui depuis son début a toujours été exceptionnelle ? Si je pose cette question à toute personne en dehors de moi, on me répondra que c’est une évidence. Alors, je ne la pose pas, c’est mieux comme ça. Il y a quelques jours de cela, on m’a demandé si parfois j’avais envisagé de tout abandonner, arrêter les traitements et laisser la nature faire ce qu’elle avait décidé. Et bien oui, plusieurs fois j’y ai songé… Mais plusieurs fois, je me suis ravisée. Est-ce que je la veux à tout prix cette vie ? Aujourd’hui, je crois que oui… Mais je me pose tout de même ces questions froides et sans émotion. Je me demande simplement si je suis prête, si j’en suis capable, et si j’en assumerais les conséquences. Cette croisade a tellement d’impacts sur moi et ma tribu, qu’imaginer que tout cela puisse durer le restant de notre vie ne me fait pas rêver. Est-ce que je la veux à tout prix cette vie ? Aujourd’hui, je crois que oui… Mais hier j’aurais bien signé pour le contraire. L’idée d’avoir une vie plus courte mais moins douloureuse, moins traumatisante et plus apaisante m’avait charmée. Est-ce que je la veux à tout prix cette vie ? Aujourd’hui, je crois que oui… Mais qu’en sera-t-il de demain ? L’avenir me le dira bien…