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« Témoigner procure du sens à sa propre existence et permet à d’autres d’en tirer avantage. »
Philippe Bataille, sociologue
Le 21 décembre 2017 je suis admise d’urgence à l’hôpital de Bayonne, j’ai une leucémie aigüe. J’ai 46 ans et deux enfants de 12 et 15 ans, je suis séparée de leur père donc ce qu’on appelle « maman solo ».
Un mois avant, le 30 novembre 2017 je perds mon emploi de chef de projet dans une société de service informatique, suite à un licenciement économique. Je m’inscris à pôle emploi. Ayant 46 ans et 19 ans d’ancienneté je suis éligible au Contrat de Sécurisation Professionnelle (CSP) , qui maintient mon salaire pendant un an. J’ai aussi le droit de garder ma mutuelle et mon contrat de prévoyance pendant un an.
Etant malade, Je passe donc en affection longue durée (ALD), je touche des indemnités journalières, je suis désinscrite de pôle emploi et, à cause d’un vide juridique, je perds mon droit au CSP puisque je vais être en maladie plus d’un an.
J’ai besoin d’une allogreffe, je n’ai ni frère, ni soeurs, et aucun donneur compatible sur le fichier international. Mes enfants mineurs, ma mère trop âgée ne permettent pas d’avoir une greffe alternative haplo-identique. Je termine mes 4 cycles de chimio en secteur protégé (4 à 6 semaines enfermée « en confinement » avec mon pied de perf sans pouvoir voir mes enfants).
Je rentre chez moi avec l’espoir de ne pas rechuter n’ayant pas eu de greffe.
Je contacte pôle emploi, mon conseiller est très bienveillant et m’explique mes droits, la perte du CSP etc. Au même moment après un délai de 6 mois je peux bénéficier de l’assurance de mon emprunt immobilier et de mon contrat de prévoyance qui me permet de retrouver une rémunération normale pendant les 6 prochains moi.
Je rechute en juillet et je retourne en chimio, après deux cycles de chimio, j’apprends que je peux bénéficier d’une greffe alternative avec le sang du cordon d’un bébé espagnol, une petite fille. Je pars en greffe à Bordeaux fin octobre 2018. Après une irradiation corporelle totale 2 fois par jour pendant 3 jours puis une chimiothérapie, je suis greffée le 27 octobre.
Fin novembre, je n’ai plus droit à la prévoyance et donc au complément des indemnités journalières. Ceci ne me tracasse pas plus que ça, j’ai contracté une aspergillose : infections causées par des champignons appartenant au genre Aspergillus, dont les spores sont véhiculées par l’air et sont inhalées par tous les individus. Totalement inoffensif pour la majorité de la population, elle peut être mortelle lors d’une greffe.
Je suis en réanimation sous respirateur. Je me fiche un peu de ma rémunération.
Je m’en sors, je descends de mon lit de réa, je tombe, je ne sais plus marcher. Je quitte l’hôpital le 24 décembre complètement exsangue avec 10 kilos de moins, mais je n’ai jamais été aussi heureuse. Ma convalescence dure jusqu’au 1er mars 2020. Mais je passe le réveillon à l’hôpital le 31 décembre 2019 à cause d’une grave varicelle : les greffés perdent leur immunité acquise, et sont longtemps immunodéprimés surtout avec une greffe de sang de cordon, une rougeole peut être fatale.
Fin janvier je suis contactée par le médecin conseil de la CPAM, pour faire le point. Nous décidons que je suis apte à retravailler et je suis encadrée par une assistante sociale pour les démarches MDPH*.
En février je suis déclarée travailleur handicapé pour 5 ans et je bénéficie d’une pension d’invalidité de type 1.
Je me réinscris à pôle emploi et vient le confinement COVID. Je refais un CV et déclenche des polémiques sur mentionner ou pas la maladie sur un CV, il y a les pour et les contres.
Une conseillère de la ligue contre le cancer me conseille de ne pas le mentionner. J’indique donc : arrêt d’activité pour mener à bien un projet personnel (ce projet est en fait : « au secours sortez-moi de là je veux voir grandir mes enfants »).
*Maisons départementales des personnes handicapées
J’ai eu l’occasion de parler à d’autres greffés. Une professeure du collège de mes enfants m’a dit qu’elle avait très vite repris en mi-temps thérapeutique mais l’éducation nationale lui permettait de ne pas travailler pendant 5 ans, si elle le désirait. Un artisan m’a raconté avoir été désespéré de perdre tous ses clients dès l’annonce de sa maladie et a recommencé à travailler sitôt sorti de l’hôpital (un exploit selon moi).
Je dois aussi dire que j’ai toujours été contactée par des assistantes sociales pendant mes séjours à l’hôpital. Je sais que des enfants sont placés quand leur parent tombe malade, d’autres perdent leur garde exclusive, j’ai entendu des histoires déchirantes.
Pour ma part, jamais je n’aurais cru trouver du travail aussi rapidement à 49 ans, en rémission. J’enchaine les miracles. Je vis avec une épée de Damoclès mais je vis. Et je dois ajouter que je suis très entourée, mon ex conjoint a montré beaucoup de compréhension, sa famille a toujours été présente, les amis qui m’ont soutenue sont les meilleurs du monde. Quant au reste, la leucémie a fait un grand ménage en ne gardant que l’essentiel.
La maladie est un cauchemar qui dévaste tout mais fait aussi naître aussi beaucoup d’amour et de sentiments incroyables, dénoue les noeuds de la vie, fait repousser des fleurs sur une terre brûlée.
Je termine en soulignant que notre système de santé est d’une qualité extrême, l’hôpital haut l’évêque à Pessac, l’hôpital de Bayonne ont des services d’hématologie de pointe. L’assurance maladie prend en charge à 100% des coûts délirants (sans mentionner les produits de chimiothérapie, j’ai pris un an une thérapie ciblée a plus de 3000 euros par mois). Il faut savoir que des gens meurent en Europe et dans le monde de ne pas pouvoir se payer les traitements. Alors même si le fait d’avoir eu un bon salaire m’a aidée pour les indemnités journalières et pôle emploi, nous avons la chance d’avoir beaucoup d’aides. Et je ne cesse de dire à mes amis auto entrepreneurs de bien penser aux prévoyances, aux assurances parce que tout peut être malheureusement possible dans la vie. Tout peut basculer.
Merci de m’avoir lue. C’est un peu long mais je pourrai remplir 50 pages de plus !
*@aupaysalice est le profil Instagram de Muriel 😉
Il n’y a pas de mots pour vous dire tout le respect que l’on à face à votre volonté malgré toutes les embûches que l’on trouve sur le chemin de la maladie. Votre force de vivre pour vos enfants à fait de vous une guerrière. Et vous allez gagner avec votre volonté et le soutien de tous.on vous admire. On vous aime. COURAGE.
Bravo alice vous êtes une guerrière et cette administration de simple soldats aux ordres d une bureaucratie depourvue d empathie d humanité
Courage vous êtes un joli modèle pour vos enfants
Avec tout mon soutien
Quel parcours incroyable de courage et de détermination !ayant eu un cancer moi aussi je suis admirative devant votre combativité ! Vous avez subi les affres de la maladie les errances scandaleuses de l’administration qui juge que les souffrances physiques et morales ne suffisent pas et qui essaient d’en rajouter ! Je ne sais pas comment vous avez fait pour ne pas sombrer ! Toute mon admiration et tous mes souhaits de réussite
Vous avez bien de la chance chère Madame, parce que les choses ne se passent pas ainsi pour tout le monde pareil.
Pour ma part par deux fois j’ai perdu mon emploi à cause de cette maladie.
A 54 ans on m’en a fait voir pendant quelques mois avant de finir par trouver des prétextes pour me virer comme un mal propre. Travaillant dans un milieu Ht radioactif mon employeur prévenu par la médecine du travail a fini par me trouver des lacunes pour me virer. Je n’étais pas encore traité à cette époque, simplement sous surveillance médicale et naïvement sous les conseils de la médecine du travail j’essayé en vain de faire reconnaitre ma maladie en maladie professionnelle, ce qui n’a absolument pas plu à mon employeur de l’époque. Et pour le pompon même ma maladie malgré avoir été plusieurs fois exposé aux rayonnements ionisants n’a pas été reconnue comme telle en tant que maladie professionnelle.
En fait je n’aurai jamais dû suivre les conseils de la médecine du travail, j’aurai sauvegardé mon emploi encore quelques temps et ça m’aurait évité bien des ennuis. Car le jour où j’ai eu besoin d’e cette médecine afin qu’ils témoignent des effets des radiations sur ma santé, il n’y avait plus personne pour m’aider. Dans les hautes sphères ils en ont déduit qu’il n’y avait aucun lien et je fini par être viré.
Dégouté, avec ce cancer à l’époque encore sous surveillance, j’ai dû repartir à zéro jusqu’à changer de région pour trouver un autre emploi tout en cachant cette affreuse maladie.
Je finis par retrouver un autre emploi me promettant de ne plus jamais révéler cette maladie afin d’éviter tous problèmes, et cela m’a réussi pendant près de 4 ans, j’étais heureux d’avoir pu repartir je réussi même à avoir une promotion. Malheureusement la maladie sous surveillance se déclarait brutalement et je dû une première fois me faire traiter par immunochimiothérapie, j’ai été contraint d’être arrêté pendant près de dix mois, et par anticipation j’ai repris mon travail. Mais là aussi trahi par la médecine du travail mon employeur fini par être au courant de mon cancer. J’ai été obligé de passer ce médecin au Conseil National de l’Ordre des Médecins pour « non-respect du secret médical » Mais c’était trop tard, tout le monde savait ma maladie. On a commencé par me mettre au placard pendant près d’un an, me tapant réflexion sur réflexion que je leur faisais perdre de l’argent, malgré une protection RQTH, puis on a fini par me virer une seconde fois de plus en pleine hospitalisation qui à durer 6 mois dont 1 mois isolé en chambre stérile pour subir également une greffe de moelle osseuse.
Aujourd’hui je me demande à quoi bon… s’il ne vaut pas mieux en finir parce que sincèrement, je suis fatigué de me battre…