Traverser la maladie, le cancer, c’est vivre le deuil, quasiment au quotidien.

Car il y a un « avant » et un « après », et il faut pouvoir accepter de renoncer à des choses que nous croyions essentielles, ou qui faisaient plus ou moins profondément partie de nous… et en accepter d‘autres, pas toujours agréables.

Par exemple, pour moi, cela fut/est :

  • La perte de la maîtrise de mon temps car mon emploi du temps a été rythmé pendant près d’un an par les consultations, examens, opérations, soins et autres rdv médicaux.
  • Les cicatrices, qui m’ont fait douter de moi, de ma capacité à être « aimable » (= digne d’être aimée) dans cette société qui nous serine qu’il faut être parfaite physiquement pour plaire. Ce qui est très loin de l’amour véritable.
  • La douleur, plus ou moins présente, plus ou moins forte, mais toujours là, en background, se manifestant insidieusement, ou violemment et brusquement, et qui réveille en pleine nuit.
  • La fatigue au moindre effort, couplée à l’essoufflement, m’empêchant de faire la moindre tâche un peu soutenue (ou m’envoyant directement au lit d’épuisement – et je n’exagère pas).
  • Les nuits hachées, décalées… me faisant parfois me lever déjà à plat.
  • Les troubles de la mémoire, qui me choquent le plus, car créant une anxiété diffuse (et si c’était autre chose ?).

Pour d’autres, cela sera également :

  • la perte des cheveux et autres poils,
  • l’ablation d’un sein, ou des 2,
  • une prise de poids rapide,
  • la dépression…

La liste n’est malheureusement pas exhaustive !

Quoi qu’il en soit, je sais que je m’en suis bien sortie et je ne me plains pas, même si ce n’est pas toujours drôle.

Comme nous toutes, je ne suis plus la même personne que j’étais hier, le mois dernier, l’année ou la décennie précédente : j’ai expérimenté autre chose, appris d’autres leçons, peut-être acquis un peu de sagesse.

Et je choisis de regarder, non ce que j’ai perdu, mais ce qu’il me reste, et surtout ce que j’ai gagné en échange :

  • La conscience de la valeur et de la beauté de la vie.
  • La confiance et le lâcher-prise : je vis maintenant sans (trop) me soucier du passé (que je ne peux changer) ni du futur (sur lequel je n’ai aucune prise).
  • La compréhension de mes besoins profonds, de mes valeurs, de ma valeur, ce qui me fait me recentrer sur moi, et dire « non » quand cela ne me convient pas…

Et j’en parle, parce que je veux témoigner et libérer la parole, mais je connais tellement de sœurs de combat qui n’osent même plus en parler, de peur de s’entendre dire : « tu te plains tout le temps ».

Non, nous souffrons tout le temps, physiquement et/ou moralement, nuance.

Même si cela ne se voit pas.